Connaître concrètement les « sources du droit du travail » c’est-à-dire les différentes normes à l’origine du droit du travail présente une importance particulière dans cette matière puisque qu’aux sources classiques (normes internationales, constitutionnelles, légales, règlementaires, jurisprudentielles…) s’ajoutent des sources « professionnelles » ne figurant dans aucune autre matière.
Quelques précisions sur les termes de « sources » et de « droit du travail »…
Sources. Déterminer les sources du droit revient à s’intéresser à l’auteur de la règle de droit, c’est-à-dire à la personne qui en est à l’origine, qui en est le créateur et l’a conçu.
Droit du travail. Le Droit du travail est une branche du droit qui recouvre l’ensemble des règles juridiques ayant pour objet, dans le secteur privé, les relations du travail entre employeurs et salariés et régissant les rapports d’emploi (l’accès à l’emploi, le contrat de travail, le licenciement) et les rapports professionnels qui présentent une dimension collective (grève, négociation et conventions collectives, syndicats, représentation du personnel…). (Lexique des termes juridiques, Dalloz, 15ed).
Droit social ? Le Droit social a un champ d’application plus large que le Droit du travail puisque cette matière comprend le droit du travail mais aussi le droit de la protection sociale, le droit de la formation professionnelle, le droit de l’épargne salariale, le droit social européen et international, le droit de la protection sociale…
Dans cet article, nous allons couvrir tout ce qu’il faut savoir sur le thème des sources du droit du travail (et non sur celui de la hiérarchie des normes en droit du travail déjà traité dans cet article) en vue d’un examen en prenant soin d’illustrer chaque explication par des exemples issus de l’actualité.
C’est parti !
I. Sources internationales du droit du travail
A. Sources mondiales
Pour l’essentiel on peut évoquer les conventions internationales suivantes :
1. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (signé le 16 déc. 1966 et entré en vigueur le 3 janv. 1976)
On peut citer à titre d’exemples de dispositions intéressant les relations de travail :
- L’interdiction du travail forcé (art.8) ;
- Le principe de non-discrimination (art. 26).
2. Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (signé le 16 déc. 1966 et entré en vigueur le 3 janv. 1976)
On peut citer à titre d’exemples de dispositions intéressant les relations de travail :
- Le droit à la formation (art. 6.2) ;
- Le congé maternité rémunéré (art. 10.1).
Effectivité de ces sources
Ces conventions ne sont pas simplement des grands principes dépourvus de toute force obligatoire. Certaines dispositions ont une applicabilité directe devant les juridictions internes et contribuent à faire évoluer le droit du travail français.
Exemple : Soc., 16 déc. 2008, 05-40.876. La Cour de cassation a fait application de l’article 6.1 du Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels de 1966, reconnaissant ainsi son applicabilité directe, s’agissant de la compensation financière due en cas de clause de non-concurrence.
3. Les conventions issues de l’Organisation internationale du travail
Présentation de l’OIT
L’Organisation internationale du travail est une organisation rattachée à l’ONU et dédiée spécifiquement au droit du travail. Elle fut créée en 1919, sous l’égide du Traité de Versailles qui mettait fin à la Première Guerre mondiale.
Parmi ses activités, elle adopte des conventions qui doivent être ratifiées par les pays membres pour avoir force obligatoire.
Exemple : Convention n°29 sur le travail forcé (1930) ayant pour objet la suppression du travail forcé obligatoire sous toutes ses formes sauf certaines exceptions comme par exemple le service militaire ou le travail des condamnés.
Effectivité de ces sources
Plusieurs mécanismes permettent aux conventions adoptées dans le cadre de l’OIT de s’appliquer en droit français :
- Un suivi régulier de l’application et de la ratification des conventions conduisant à la rédaction d’observations compilées dans les rapports publics annuels ;
- Des procédures de plaintes entre États ou de réclamations déposées par les organisations d’employeurs ou de travailleurs pouvant conduire à des condamnations symboliques ;
- Le rôle joué par les juridictions nationales puisque les conventions de l’OIT ayant été ratifiées sont directement invocables devant les juridictions internes ce qui permet une réelle évolution du droit du travail français.
Exemple : Barèmes “Macron” et convention n°158 de l’OIT. L’Ordonnance du 22 septembre 2017 a instauré des barèmes ayant vocation à encadrer le montant des indemnités qu’un salarié peut demander à son employeur devant une juridiction en cas de reconnaissance d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse (C. trav., L.1235-3). De nombreux salariés ont contesté la conventionalité de cette réforme sur le fondement de l’article 10 de la convention n° 158 de l’OIT et de l’article 24 de la charte sociale européenne. Dans un avis du 17 juillet 2019, la Cour de cassation a, d’une part, reconnu l’effet direct de l’article 10 de la convention de l’OIT et, d’autre part, jugé le barème de l’article L.1235-3 compatible avec ces dispositions (Avis., 17 juill. 2019, 19-70.010).
B. Sources européennes
1. Droit du Conseil de l’Europe
Le Conseil de l’Europe est une organisation intergouvernementale créée en 1949. Elle regroupe aujourd’hui 47 États et 833 millions d’habitants. Deux conventions importantes intéressant le droit du travail ont été adoptées :
Première convention : La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
Elle a été signée le 4 novembre 1950 et n’est pas spécifique au droit du travail mais son influence sur le droit du travail français est importante pour les raisons suivantes :
(1) Les dispositions de la convention bénéficient d’un effet direct. Tout justiciable peut invoquer les dispositions de la convention dans ses rapports avec l’État (effet direct vertical) ou avec d’autres particuliers (effet direct horizontal) devant les juridictions françaises.
(2) La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) peut être saisie par toute personne après épuisement des voies de recours internes. Elle peut également, depuis le 1er août 2018, être saisie par la Cour de cassation ou le Conseil d’État pour avis.
(3) Une décision de la CEDH sanctionnant la France rend nécessaire une modification de la loi pour en tenir compte.
La CEDH ne peut annuler une norme nationale contraire à la Convention mais il appartient à l’État mis en cause de remédier à la violation constatée selon les moyens qu’il choisit (Article 46 de la Convention).
Exemple : À la suite d’une décision de condamnation de la CEDH le 2 octobre 2014, les militaires français, qui ont toujours été privés du droit syndical, ont obtenu la reconnaissance du droit d’association, l’article 4121-4 du code de la défense ayant été modifié à la suite de cet arrêt (CEDH 2 oct. 2014, Matelly c/ France, 10609/10).
(4) Les juges français doivent tenir compte de l’interprétation donnée par la CEDH dans les décisions qu’ils rendent même si elles concernent d’autres pays membres du Conseil de l’Europe (c’est ce qu’on appelle « l’autorité interprétative »).
Exemple : L’article 11 sur la liberté syndicale (« Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association, y compris le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts ») a conduit la Cour à juger que l’interdiction pure et simple de constituer un syndicat ou d’y adhérer porte à l’essence même de cette liberté, une atteinte prohibée par la Convention (CEDH 2 oct. 2014, Matelly c/ France (n° 10609/10). De même, l’article 6 de la Convention prévoyant le droit à un procès équitable devant un tribunal indépendant et impartial devant statuer dans un délai raisonnable a pu être invoqué par des justiciables afin de contester l’impartialité des conseils de prud’hommes en raison de leur composition (ils sont composés de représentants des salariés et de représentants des employeurs) dans l’arrêt : CEDH, 22 juin 1989, Langborger c. Suède, n° 11179/84, § 34-35.
Deuxième convention : La Charte sociale européenne
Adoptée en 1961, révisée en 1996 (parfois dénommée « Constitution sociale de l’Europe ») elle est un traité du Conseil de l’Europe qui garantit les droits sociaux et économiques fondamentaux. Elle garantit un large éventail de droits de l’homme liés à l’emploi, au logement, à la santé, à l’éducation, à la protection sociale et aux services sociaux (elle contient 31 articles).
Pour en savoir plus sur la Charte sociale européenne cliquez ici.
Pourquoi le respect des engagements contractés par les États parties est beaucoup plus restreint que pour la Convention européenne des droits de l’homme ?
Le respect des engagements contractés par les États parties est beaucoup plus restreint que pour la Convention européenne des droits de l’homme car, d’une part, les réclamations des particuliers ne sont pas recevables et, d’autre part, les juridictions internes sont réticentes à reconnaître aux dispositions de la Charte un effet direct.
Le Conseil d’État a pu admettre l’effet direct vertical des stipulations de l’article 24 de la Charte dans le cadre d’un litige opposant une chambre de métiers à un de ses salariés (CE, 10 février 2014, M. Fischer, n° 359892) mais la Cour de cassation a estimé dans un avis du 17 juillet 2019 (Avis Cass. 17 juill. 2019, 19-70.010) que l’article 24 de la charte sociale européenne n’avait pas d’effet direct.
Pourquoi la Charte sociale européenne influence-t-elle quand même le droit du travail français ?
1. La Cour européenne des droits de l’homme s’inspire parfois des dispositions de la Charte sociale européenne pour interpréter le texte de la Convention.
Exemple : La Cour a ainsi déduit de l’article 8 de la Convention le droit à la vie professionnelle prévu par l’article 1 paragraphe 2 de la Charte sociale européenne (CEDH, 27 juill. 2004).
2. Les juridictions françaises s’inspirent dans certains cas des dispositions de la Charte.
Exemple : Le droit français a évolué s’agissant de la question des forfaits jours à la suite de plusieurs décisions rendues par le Comité européen des droits sociaux rendues sur le fondement de l’article 2. 1 de la Charte sociale européenne (« les parties contractantes s’engagent à fixer une durée raisonnable au travail journalier et hebdomadaire »).
2. Droit de l’Union européenne
Le Droit de l’Union européenne imprègne grandement le droit du travail français.
Types de règles du droit de l’Union européenne
On distingue le droit primaire, constitué des traités constitutifs de l’Union européenne et de ceux qui sont venus les compléter et les modifier, du droit dérivé comprenant notamment les règlements et les directives de l’Union européenne.
Les règlements européens ne peuvent pas, en principe, être adoptés en droit du travail, seules des directives pouvant être adoptées. Par ailleurs, tous les thèmes ne peuvent pas être abordés (le thème de la grève ou de la rémunération sont exclus : TFUE, art. 153.5).
Synthèse des règles issues du droit de l’Union européenne
Il est impossible de procéder à une présentation détaillée de ces règles. Sachez simplement que, s’agissant des relations individuelles de travail, le droit de l’Union européenne met en place :
1. Des règles qui tendent à assurer la libre circulation des travailleurs, l’objectif étant de créer un marché unique du travail au sein de pays membres de l’Union européenne
La libre circulation des travailleurs au sein de l’Union européenne peut se faire :
- Dans le cadre d’une prestation de travail sur le fondement de l’article 45 du TFUE et vise alors les travailleurs qui souhaitent circuler au sein de l’Union européenne. Les règles organisent cette liberté de circulation et mettent en place un principe d’égalité de traitement entre les travailleurs européens.
- Dans le cadre d’une prestation de service sur le fondement des articles 56 et s. du TFUE lorsqu’un salarié travaillant habituellement dans un État membre de l’Union européenne est détaché par son employeur dans un autre État membre de l’Union européenne pour y exercer son travail dans le cadre d’une prestation de service.
Actualité. Le détachement de salariés au sein de l’Union européenne pose la question du « dumping social » (mise en concurrence par les employeurs, dans le cadre de la mondialisation économique, de travailleurs des pays développés avec la main-d’œuvre moins chère des pays en développement). La principale difficulté réside dans la différence entre le niveau de cotisations patronales dans les pays d’origine (beaucoup plus faible) et celui imposé aux entreprises en France conduisant à baisser considérablement le coût du travail pour l’employeur détachant des salariés en France par rapport à celui qui y est installé. Récemment, l’ordonnance du 20 février 2019 a transposé une directive du 28 juin 2018 modifiant une directive de 1996 sur le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de service. Cette transposition permet d’assurer une meilleure équité de rémunération entre salariés détachés et salariés du pays d’accueil et de rendre plus largement applicable le droit du travail français au-delà d’une certaine durée de détachement.
2. Des règles qui tendent à harmoniser l’ensemble des législations des pays européens
De nombreuses directives intéressent les relations individuelles de travail dans des thèmes variés (sécurité au travail, temps de travail, transfert des contrats de travail, interdiction des discriminations…) et imposent donc aux États une transposition dans leur droit interne (si le droit interne n’est pas déjà conforme).
Effectivité du droit de l’Union européenne
L’influence du droit de l’Union européenne sur le droit du travail français est réel grâce à plusieurs mécanismes permettant d’assurer l’effectivité du droit de l’UE :
Mécanisme n°1 : L’immédiateté du droit de l’Union européenne. La norme communautaire s’intègre automatiquement dans l’ordre juridique des États membres et produit des effets juridiques dans le droit interne sans besoin d’y être transposée. Ce principe concerne les normes de droit primaire.
Mécanisme n°2 : La primauté du droit de l’Union européenne. Toute disposition obligatoire du droit de l’Union prime sur les dispositions du droit national quelle que soit leur place dans la hiérarchie des normes et quelle que soit leur date d’adoption (CJCE 15 juill. 1964, Cosat c. ENEL, aff. 6/64). Ce principe bénéficie aux normes issues du droit primaire ou du droit dérivé.
Mécanisme n°3 : L’effet direct du droit de l’Union européenne. L’effet direct dépend de la source applicable (traités, règlements ou directives). S’agissant de l’effet direct des directives, je vous renvoie aux explications développées dans cet article.
Mécanisme n°4 : Le renvoi préjudiciel. La Cour de justice peut être sollicitée dans le cadre du renvoi préjudiciel de l’article 267 TFUE. Cet article permet aux juges nationaux de soumettre à la CJUE des questions d’interprétation ou de validité des dispositions du droit de l’Union européenne.
Exemple : Le port du voile en entreprise. La Cour de cassation a transmis à la CJUE une question préjudicielle portant sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000 afin de savoir si les souhaits de la clientèle de ne pas travailler avec une femme voilée peuvent constituer, ou non, une « exigence essentielle et déterminante » faisant exception à la discrimination pour motif religieux. La CJUE a considéré que la volonté d’un employeur de tenir compte des souhaits d’un client de ne plus voir les services dudit employeur assurés par une travailleuse portant un foulard islamique ne saurait être considérée comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante au sens de la directive 2000/78/CE (CJUE 14 mars 2017 C-188/15).
II. Sources nationales du droit du travail
A. Sources constitutionnelles
Quels sont les textes constitutionnels relatifs au droit du travail ?
La Constitution française votée le 4 octobre 1958. Peu de dispositions dans la Constitution concernent le Droit du travail. Seul l’article 1 proclame que « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale » et l’article 34 indique que « la loi détermine les principes fondamentaux (…) du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale ».
La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) de 1789. Certaines dispositions intéressent directement les relations de travail comme la liberté d’entreprendre dont la valeur constitutionnelle a été déduite de l’article 4 de la DDHC par le Conseil constitutionnel (C.const., Décision n°81-132 DC, 16 janv. 1982) et la liberté du travail (C.const., Décision n° 83-156 DC du 28 mai 1983).
Le Préambule de la Constitution de 1946. L’essentiel des normes sociales figurent dans le Préambule de la Constitution de 1946 qui proclame les principes économiques et sociaux « particulièrement nécessaires à notre temps » (Ex. : le droit syndical : alinéa 6 ; le droit de grève : alinéa 7…).
La Charte de l’environnement. Aucune disposition de la Charte n’intéresse directement les relations de travail. Toutefois, les « enjeux sanitaires rendent inextricables la protection de la santé et sécurité des salariés et celle de l’environnement » (V. Monteillet, Cah. soc. nov. 2017, n° 121t7, p. 549) de sorte que cette Charte pourrait potentiellement trouver à s’appliquer en matière de droit du travail.
La jurisprudence du Conseil constitutionnel. Certains principes à valeur constitutionnelle concernent le droit du travail comme la liberté d’entreprendre (Cons. const. 16 janv. 1982, 81-132 DC, DDHC art. 4) ou le droit de grève (Cons. const. 15 mars 2012, 2012-650 DC). En revanche, il n’existe pas à notre connaissance d’objectifs à valeur constitutionnelle concernant directement les relations de travail.
Quelle effectivité des normes constitutionnelles ?
L’influence des normes constitutionnelles sur le droit du travail se manifeste notamment par l’encadrement de l’activité législative par le Conseil constitutionnel via le contrôle de constitutionnalité a priori (Const., art. 61) et a posteriori (Const., art. 61-1). L’article 62 de la Constitution dispose « les décisions du Conseil s’imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ».
Par ailleurs, les règles constitutionnelles s’appliquent parfois directement dans les relations privées entre employeurs et salariés.
Exemple : La Cour de cassation n’hésite pas à faire référence dans certains arrêts à des normes de valeur constitutionnelle : Soc., 19 nov. 1996, 94-19.404).
Cliquez-ici pour en savoir plus sur ce thème.
B. Sources légales
1. La loi en droit du travail
L’article 34 de la Constitution confie au législateur la compétence de déterminer les principes fondamentaux du droit du travail. Toutefois, la loi ne se contente pas de fixer ces principes mais n’hésite pas à aller dans le détail des règles.
Par ailleurs, l’article L. 1 du Code du travail, issu de la loi « Larcher », impose une concertation préalable des partenaires sociaux avant tout projet de réforme portant sur le droit social. Cet article formalise une technique législative consistant à englober la négociation collective dans la loi. On parle de « conventionnalisation de la norme législative » ou « négociation légiférante » pour évoquer cette association dans l’élaboration de la norme entre le législateur et les partenaires sociaux.
Concrètement, les partenaires sociaux peuvent conclure un Accord National Interprofessionnel, qui sera repris par la loi.
Exemple : ANI du 11 janvier 2013 puis loi du 14 juin 2013 sur la sécurisation de l’emploi.
Pour mieux comprendre le contexte d’une telle concertation des partenaires sociaux cliquez-ici.
2. Le Code du travail
Les lois et les règlements intéressants le droit du travail sont, dans leur majorité, codifiés dans le Code du travail. Il est composé d’une partie législative (articles « L ») et d’une partie règlementaire (articles « D » et « R ») et est divisé en Parties (8), divisées en Livres, en Titres puis en Chapitres.
3. Jurisprudence
Bien qu’officiellement, la jurisprudence n’est pas une source du droit, en pratique de nombreux arrêts posent des règles générales. Son rôle est particulièrement important en droit du travail.
Exemple : Les arrêts du 10 juillet 2002 constituent un bon exemple du rôle créateur de la jurisprudence. Dans ces arrêts, la Cour de cassation a affirmé qu’une clause de non-concurrence n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour l’employeur de verser au salarié une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives en se fondant sur le principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle et l’ancien article L. 120-2 du Code du travail.
Pour en savoir plus sur ce thème : Raisons de la construction prétorienne du droit du travail, Semaine Juridique Social n° 46-47, 10 Novembre 2009, 1516.
C. Sources professionnelles
1. Conventions et accords collectifs
Les conventions et accords collectifs sont conclus par un ou plusieurs syndicats ou groupements d’employeurs et une ou plusieurs organisations représentatives des salariés.
Les conventions régissent l’ensemble des conditions de travail alors que les accords collectifs ne traitent que des points précis.
Trois points sont à connaître sur les conventions et accords collectifs :
1er point : Nature hybride des conventions et accords collectifs
La conclusion des conventions et accords collectifs naît de la rencontre de deux volontés (partie patronale et partie salariale constituée par un ou plusieurs syndicats représentatifs) et, de la même manière qu’un contrat, donnent naissance à des obligations contractuelles et lient tous les signataires de l’accord.
De l’autre côté, de la même manière qu’une loi ou un règlement, ils bénéficient d’un effet erga omnes en ce qu’ils s’appliquent à des personnes qui n’ont pas participé à leur élaboration (tous les salariés entrant dans leur champ d’application).
2ème point : Différents niveaux de négociation
Les conventions collectives se distinguent entre elles selon leur champ géographique et professionnel.
- Accord national interprofessionnel : concerne l’ensemble des branches et des entreprises;
- Convention de branche : conclue au niveau d’une branche d’activité (ex. : métallurgie, construction, banque…) et joue un rôle de police sociale de la concurrence entre les entreprises composant la branche;
- Accord professionnel : conclu au profit d’une profession déterminée ou d’un métier identique et s’applique quelle que soit la branche ou l’entreprise d’appartenance (ex. : Convention collective nationale de travail des journalistes).
- Accords d’entreprise, d’établissement, de groupe : ont pour objectif d’adapter la règle à la situation des salariés. La négociation d’entreprise est favorisée par le législateur qui entend rendre la règle légale plus flexible.
- Accord interentreprise : la loi du 8 août 2016 prévoit la conclusion d’accords entre plusieurs entreprises (C. trav., L. 2232-36 à L. 2232-38).
3ème point : Conventionnalisation du droit du travail
On assiste depuis plusieurs années à un phénomène de « conventionnalisation du droit du travail » en raison notamment de l’élargissement de l’espace de négociation ouvert à la branche et à l’entreprise.
2. Usages
C’est un avantage accordé librement et de manière répétée par un employeur à ses salariés, sans que le code du travail, une convention ou un accord collectif ne l’impose (ex. : prime de 13ème mois accordée par usage).
Le salarié qui souhaite apporter la preuve d’un usage devra démontrer (conditions jurisprudentielles):
- la généralité de l’usage supposant que l’avantage soit versé à la collectivité de travail;
- la constance qui permet de distinguer les avantages permanents des avantages exceptionnels;
- la fixité qui signifie que la nature et le montant de l’avantage sont identiques;
Si l’un de ces critères n’est pas satisfait, la Cour de cassation qualifie l’avantage en question de prime discrétionnaire qui n’oblige pas l’employeur pour l’avenir (Soc., 18 fév. 2015, n° 13-23.100).
Le salarié peut se prévaloir d’un usage et demander en justice l’exécution forcée et la réparation de son préjudice résultant du non respect de l’usage par l’employeur sauf en cas :
- D’extinction de l’usage. L’usage professionnel disparait à défaut pour la pratique d’être régulière.
- De dénonciation de l’usage. L’employeur peut décider unilatéralement de dénoncer l’usage à condition de respecter un délai de prévenance (1), d’informer les salariés en leur notifiant la dénonciation individuellement (2) et d’en informer les représentant du personnel (3) (conditions jurisprudentielles).
- De remise en cause par le biais d’un accord collectif. Un accord collectif, même moins favorable, conclu avec un délégué syndical portant sur le même objet que l’usage (ou l’accord atypique ou l’engagement unilatéral) permet de le remettre en cause sans qu’il soit nécessaire de procéder à sa dénonciation. L’usage est immédiatement remplacé par l’accord collectif (Soc., 25 janv. 2006, 04-42.793)
Si l’usage n’a été pas été régulièrement dénoncé il demeure en vigueur et le salarié peut continuer à s’en prévaloir (Soc., 13 févr. 1996, 93-42.309).
3. Engagements unilatéraux
C’est une décision par laquelle l’employeur crée au profit de ses salariés des droits nouveaux. Il s’agit d’une notion issue du droit des obligations. L’engagement unilatéral fait reposer sur l’employeur soit :
- Une obligation de donner (ex. : versement d’une prime de noël);
- Une obligation de faire;
- Une obligation de ne pas faire.
Concrètement, pour qualifier un engagement unilatéral :
- Il n’est pas nécessaire de caractériser une constance ou une fixité;
- Il faut caractériser une volonté valablement exprimée ce qui ne peut découler de simples commentaires figurant sur un document de travail sans valeur normative (Soc. 4 juill. 2006, n° 04-47.408).
- Il faut ensuite raisonner par analogie en puisant dans les arrêts déjà rendus par la Cour de cassation. Cette catégorie d’engagement unilatéral regroupe de très nombreux actes dont notamment des procès-verbaux de la réunion du comité d’entreprise (Soc., 29 sept. 2004) ou des circulaires internes (Soc., 3 février 1993) ;
Le régime de l’engagement unilatéral est le même que celui de l’usage (dénonciation, ou remise en cause par le biais d’un accord collectif).
4. Règlement intérieur
L’établissement d’un règlement intérieur est obligatoire dans les entreprises ou établissements employant au moins cinquante salariés (C. trav., L1311-2).
Il s’agit d’une nouveauté introduite par la loi « Pacte » du 22 mai 2019 puisque le seuil était auparavant de 20 salariés.
Les articles L. 1311-2 et suivants du Code du travail fixent le contenu du règlement intérieur et distinguent un contenu obligatoire, un contenu interdit et un contenu facultatif.
La procédure d’introduction et de modification du règlement intérieur est prévue aux articles L1321-4 et suivants.
Le Code du travail prévoit un double contrôle du règlement intérieur : (C. trav., L1322-1 et s.)
- Un contrôle administratif confié notamment à l’inspecteur du travail (C. trav., L1322-1).
- Un contrôle juridictionnel confié au juge administratif lorsqu’il s’agit de contester une décision de l’inspecteur du travail et au juge judiciaire lorsqu’il s’agit, à l’occasion d’un litige individuel entre l’employeur et le salarié, d’obtenir l’annulation d’une disposition du règlement intérieur (Soc., 16 déc. 1992, 90-14.337).
5. Les accords atypiques
Les accords conclus entre l’employeur et les représentants élus du personnel en dehors des cas réservés à la négociation dérogatoire sont des« accords atypiques » qualifiés d’engagements unilatéraux (Soc., 22 avr. 1992, 88-40.921).
6. Le contrat de travail
Le contrat de travail reste une source importante du droit du travail. De nombreuses clauses conservent une importance particulière en pratique (clause de non-concurrence, clause de dédit formation, clause de mobilité géographique…).
Résumons
Les sources du droit du travail sont les suivantes :
- Textes constitutionnels (peu en droit du travail)
- Textes internationaux (traités généraux et spécifiques comme l’OIT, droit européen et droit de l’UE)
- Textes légaux
- Textes règlementaires
- Textes professionnels : accords collectifs, engagements unilatéraux/usages, règlement intérieur
- Contrat de travail
Les sources du droit du travail en image
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